Sémiosine

Quand Hermès rend visite à l’oncle Sam

La célèbre maison de luxe française Hermès revient avec sa nouvelle campagne “Bandana de Soie”. Décryptage.

Dès les premières secondes, le ton est donné : chanson du Gun Club à forte inspiration country, jeune fille blonde installée dans la paille, image d’une Calamity Jane des temps modernes. En effet dans ce spot, Hermès rend hommage à une culture où le cheval est magnifié, celle du Western. Intégrales jeans, chapeaux à large bord, les cavalières sont affublées de la panoplie intégrale popularisée par Hollywood. Le produit mis en avant n’est autre que le bandana, morceau d’étoffe qui en premier lieu protégeait les cowboys de la poussière mais bien souvent réapproprié aux Etats-Unis par d’autres communautés (homosexuelle, hippie, bikers). Néanmoins, les cavalières d’Hermès ne sont pas uniquement des cow-girls conquérantes, elles sourient, jouent et manifestent une jeunesse évanescente et empreinte de grâce. Un signe de plus made in US, quand la cow-girl rencontre la Southern Belle.

Mais comment expliquer qu’une maison comme Hermès, symbole ancré de la francité à l’international, puisse reprendre cette culture nord-américaine, a priori bien éloignée de la sienne ? Jean-Louis Dumas, ancien PDG de la maison, déclarait « Notre premier client, c’est le cheval ; le deuxième, le cavalier ». Là où le cheval est roi, Hermès est légitime. En effet, la maison ne renie pas son héritage dans ce spot, des signaux du rayonnement français sont bien présents.

Tout d’abord, l’objet mis en avant est un carré de soie avant d’être un bandana. Les carrés de 90 x 90 cm font partie de ces pièces qui ont fait la réputation de la maison et il est uniquement présenté ici une déclinaison de cette icône. La preuve en est qu’une des cavalières le déploie fièrement sur sa monture, porte-étendard d’une maison qui sait surprendre et se renouveler perpétuellement.

Tout au long de la vidéo, des plans montrent l’animal seul, dépourvu de harnais et de selle, sublimé par une lumière douce, verticale et descendante. Nous assistons à l’évolution du jeune poulain encore animé par sa fougue, vers la monture dressée, digne, suivant au pas les ordres de sa jeune cavalière. Le dressage des chevaux par l’Académie équestre de Versailles nécessite une précision et un savoir-faire que peu de pays se targuent de pouvoir déployer. Les jeunes cavalières enchaînent les jeux (mounted games) et les démonstrations de « travail à pied », le tout orchestré par Bartabas, le directeur de l’établissement depuis plusieurs années, reconnu dans le monde entier pour sa créativité, sa vision et sa rigueur. Ces valeurs adhèrent parfaitement à celles de la maison de luxe française et cette association permet une sublimation croisée de leur savoir-faire respectif.

Ne s’agirait-il pas de la clé d’une communication de luxe réussie, à savoir : respecter les valeurs sur lesquelles elle s’est fondée tout en offrant des déclinaisons cohérentes à l’univers de marque ? Le coup de klaxon final retentissant sur une avenue Haussmannienne nous rappelle que même si Hermès aime s’aventurer du côté du Far West, la maison reste foncièrement française.

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